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31.10.14



Au même temps de remercier infiniment à Cuba par sa contribution solidaire humaine, scientifique, au Ebola, j’aimerais détacher spécialement la magnifique générosité de ce grand pays. 
Pour cela, me voici un article qu’il me semble intéressant de vous partager….


                    SOLDATS CONTRE MÉDECINS

                                         Pierre Rimbert

source:
Le Monde diplomatique - Novembre 2014

Pendant que l’Europe et les Etats-Unis frissonnent d’horreur à l’idée que le virus Ebola infeste leur métropoles plutôt que de se cantonner aux bidonvilles de Monrovia, l’épidémie met à nut l’iniquité des relations internationales. Comme le rapporte M. Edwin Fuller Torrey, directeur de l’institut de recherche médical Stanley (1), les trois états africains les plus touchés par le malade - Libera, Sierra Leone et Guinée -comptent parmi les plus dépourvus du monde en personnel médical. Selon ses estimations, seuls cent vingt médecins Libériens exerçaient dans ce pays de quatre millions trois cent mille habitants avant le déclenchement de la crise. Aux Etats Unis, en revanche, on dénombrait en 2010 pas moins de cinquante-six praticien formés au Libéria, sans inclure ceux qui n’ont pas passé d’équivalence. « le nombre total de docteurs Libériens aux Etat-Unis, écrit M. Torrey, représente probablement les deux tiers de l’effectif exerçant au Liberia ».

Au milieu des année 1960, les Etats-Unis ont ouvert leurs frontières aux travailleurs de la santé issus des pays pauvres afin de pallier une pénurie de médecins dans les zones dédaignées par les  carabins new-yorkais. Cinquante ans de fuite des cerveaux plus tard, qui remplace les soignant manquants du Libéria?
En octobre dernier, Washington se préparait à envoyer quatre mil réservistes en Afrique de l’ouest pour aider les équipes médicales à vaincre la pandémie - une opération « Soldats contre docteurs » en quelque sorte. Sur place, aux avant-poste, les militaires américains trouveront un vaste contingents de médecins….cubains. La Havane a en effect formé plusieurs centaines de docteurs et d’infirmières aux procédures anti-Ebola, sous la supervision de l’organisation mondiale de la santé. Una partie est déjà à pied d’oeuvre en Sierra Leone. ce mouvement en solidarité, presque banal à Cuba (2), a soudain provoqué l’admiration du New York Times pour « une île appauvrie qui demeure largement coupée du monde » mais « s’apprête à jouer un rôle majeur au sein des nations qui cherchent à contenir le virus », « le travail des médecins cubains profite à tous, et cela devrait être reconnu » (3), s’enthousiasme l’éditorial, avant d’appeler Washington à rétablir ses liens diplomatiques avec La Havane (lire page 20), à lever l’embargo qui prive les médecins cubains de matériels de pointe et à écouter les conseils de M Fidel Castro quand ce dernier propose une collaboration pour combattre le fléau. Du bout des lèvres, le secrétaire d’Etat John Kerry a salué, le 17 Octobre, « Cuba, un pays d’à peine onze millions d’habitants, (qui) a dépêché cent soixante-cinq professionnels de santé et prévoit d’envoyer près de trois cent de plus ».  Oubliant de préciser que son propre ministère finance depuis 2006 un programme ciblé de fuite des cerveaux baptisé « Sauf-conduit pour les professionnels de santé cubaines » et destiné à priver l’île de ses praticiens.

Comme la panique morale face à l’organisation de l’Etat islamique, la panique virale face à Ebola provoque d’étranges renversements. dans un monde où le Pentagone ravitaille en armes des combattants kurdes marxistes-léninistes dont le parti figure sur la liste américaine des organisations terroristes, faut-il s’étonner que Washington félicite La Havane tout en maintenant serré le garrot autour de l’Etat socialiste?


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(1) Edwin Fuller Torrey, « How the US made the Ebola crisis worse », The Wall Street Journal, New York, 14 Octobre 2014
(2) Lire Hernando Calvo Ospina, « Une internationale…de la santé », Le Monde diplomatique, Août 2006.

(3) « Cuba’s impressive role on Ebola », The new York Times, éditorial, 19 octobre 2014



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